Journée du 29 mars 2008
Sortant cette fois-ci du domaine des mondes hispaniques et hispano-américains, le CIREMIA a eu le plaisir d'accueillir son voisin et ami :
Franck La Brasca,
Professeur à l'Université de Tours, membre du Centre d'Études Supérieures de la Renaissance, qui nous a parlé de
La pensée et l'œuvre de Dante à l'épreuve des censures
Résumé:
"Exul immeritus", telle est l'auto-représentation que nous a donnée Dante dans la Comédie et qui a conditionné la lecture de son œuvre, qui ne se limite pas, bien entendu, au "divin" poème.
Nous nous efforcerons d'illustrer par quelques exemples précis ressortissant à l'histoire du livre, à celle de la critique, ainsi qu'à celle des controverses idéologiques et religieuses enflammées qui parcourent les siècles envisagés, de montrer comment le poète florentin, malgré ou peut-être précisément en raison de son statut d'icône identitaire de l'italianité, a pu être victime non pas seulement de la Censure (avec une majuscule) mais des censures multiples que ne manquent pas de mettre en branle les diverses institutions étatiques, éducatives et culturelles pour établir et défendre le mythe de leur pérennité.
L'intervention de Ricardo Sáez,
Professeur à l'Université de Rennes, a suscité un débat animé autour de la question des effets bénéfiques (ou non) de la censure, celle du Lazarillo de Tormes, en l'occurrence.
Censure et création: le cas du Lazarillo de Tormes (1554, 1559, 1573)
Résumé
Mon propos consistera, à partir d'une étude de cas bien précise, celle du Lazarillo de Tormes (1554), à fonder une réflexion sur le lien qui s'est noué entre la mutilation d'un texte initial et le contrôle idéologique qui l'explique, inscrits dans un contexte historique tendant à faire de l'Espagne la citadelle assiégée de l'orthodoxie religieuse en la retranchant par là même de l'Europe par un véritable "cordon sanitaire". Mais au-delà d'un tel constat factuel autant que conjoncturel, je voudrais rectifier tout un champ de lecture et d'interprétation, aujourd'hui obsolète, qui n'a fait que reprendre, dans une démarche peu critique, la vision libérale de l'école historique du XIXe siècle espagnol, prolongée de façon quelque peu servile et unilatérale par Marcel Bataillon dans un ouvrage, Erasme et l'Espagne, d'une grande intelligence, mais qui mérite d'être confronté à la lumière non des savoirs constitués mais des nouvelles conquêtes scientifiques gagnées sur le terrain des archives. Embrassée sous ce jour, l'exploration des mécanismes de censure, tels qu'ils se marquent dans la suppression des mots, des phrases et des chapitres IV et V du Lazarillo, constitue une sorte de laboratoire de la portée réelle des pratiques de censure qui se sont abattues sur un petit ouvrage "sobre et nerveux" dont on pense, à bon droit, qu'il inaugure, d'admirable et inimitable manières, la voie royale du récit picaresque espagnol.
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